Résistance aux antibiotiques : une menace pour la santé publique
Selon l’OCDE, la résistance aux antibiotiques provoque chaque année 79.000 décès, avec 1 infection sur 5 déjà résistante aux antibiotiques dans les pays membres. En Belgique, en 2019, environ 1 infection sur 11 était résistante, affectant en particulier les populations les plus vulnérables comme les personnes âgées et les très jeunes enfants. Sans action efficace et globale, des infections simples pourraient devenir intraitables, et les opérations courantes pourraient se compliquer faute de prévention des infections.
Analyse de la consommation en Belgique : des progrès limités
Une analyse menée auprès de 2,3 millions d’affiliés des 3 Mutualités Libres (Partenamut, Helan et Freie Krankenkasse) montre qu’entre juillet 2016 et juin 2024, la consommation d’antibiotiques a légèrement baissé, atteignant 17,8 doses journalières définies pour 1.000 habitants par jour. Une baisse contrastée par une consommation repartie à la hausse après la pandémie de COVID-19. Autre constat : entre juillet 2023 et juin 2024, des antibiotiques remboursés ont été délivrés par une officine publique à un tiers de nos affiliés.
Nous avons évalué aussi si différents objectifs fixés par le Plan d’action national belge AMR One Health, l’ECDC et le KCE sur la consommation des antibiotiques ont été atteints. Aujourd'hui, seul un de ces objectifs a été atteint, malgré les efforts déployés pour réduire les prescriptions inadéquates d'antibiotiques.
- Un premier objectif concernait la réduction de l’utilisation des quinolones à 5 % du volume total d’antibiotiques. Les quinolones, des antibiotiques à large spectre, sont utilisées pour traiter certaines infections graves mais leur utilisation doit être limitée en raison du développement de résistance (et des risques d’effets indésirables). Malheureusement, cet objectif n’a pas été atteint : selon le rapport BELMAP, la part des quinolones dans le volume total d’antibiotiques (y compris ceux non remboursés) reste de 7 % en 2022, au-dessus du seuil visé.
- Un autre objectif visait l’augmentation du ratio amoxicilline versus amoxicilline-acide clavulanique à 80/20. L'amoxicilline seule est préférée en première ligne, car l’ajout d’acide clavulanique élargit le spectre antibactérien et favorise ainsi un risque accru de résistance. Cependant, cet objectif n’a pas été atteint. En 2024, le ratio est de 55 % d’amoxicilline seule contre 45 % pour l’association, est encore loin du but.
- Un troisième objectif était de parvenir à une diminution globale de 40 % de la consommation d’antibiotiques par rapport à 2019. Réduire la consommation totale aiderait à préserver l’efficacité de ces médicaments essentiels. Malheureusement, cet objectif non plus n’a pas été atteint. Après une baisse temporaire pendant la pandémie, la consommation d'antibiotiques est remontée dès 2021, atteignant à nouveau des niveaux similaires à ceux de 2019.
- Une utilisation modérée des antibiotiques de deuxième ligne est aussi un objectif à atteindre. Ces médicaments doivent être réservés aux cas où les traitements standards échouent ou sont inadéquats, pour limiter l'exposition des bactéries à des antibiotiques puissants et ainsi retarder l’apparition de résistances. Ce but n’a pas non plus été atteint. Aujourd'hui, les antibiotiques de deuxième ligne représentent encore environ 47 % de la consommation totale, un niveau élevé qui indique un recours encore trop fréquent à ces traitements de réserve.
- Un objectif a néanmoins été atteint : l'utilisation majoritaire (65 %) des antibiotiques de la catégorie "Access" de l’OMS. Ces antibiotiques, efficaces contre des pathogènes courants, ont un potentiel de résistance plus faible. En 2024, 69 % des antibiotiques utilisés en Belgique appartiennent à cette catégorie, ce qui dépasse l’objectif initial.
Pour consulter un résumé des résultats ou l’étude complète, consultez les infos ici.
Un usage responsable est nécessaire
Pour enrayer la résistance aux antibiotiques, il est essentiel de :
- Soutenir les prescripteurs dans une utilisation raisonnée et modérée (p.ex. via des outils d’aide à la décision, ou via un retour d’information sur leur prescription).
- Sensibiliser les citoyens sur la prévention des infections, sur l’utilisation inappropriée des antibiotiques et les dangers liés à la résistance aux antimicrobiens.
Pour en savoir plus : visitez le site dédié à la sensibilisation sur les antibiotiques et sur la résistance aux antimicrobiens : www.parlonsantibiotiques.be.