Par conséquent, nous sommes encore loin d’atteindre les objectifs fixés par le KCE et le plan d'action belge « One Health » de lutte contre la résistance aux antimicrobiens :
- Diminution du nombre de patients et du volume d’antibiotiques : le plan d'action belge proposait une diminution globale progressive de 40 % de l’utilisation totale d'antibiotiques par rapport à 2019. Cependant, nous sommes encore loin du compte, d’autant plus que nous constatons une augmentation annuelle depuis 2021.
- Préférence pour les antibiotiques spécifiques : le KCE recommande une utilisation modérée des antibiotiques de deuxième intention qui devraient uniquement être utilisés en cas d’efficacité insuffisante d’un médicament de première intention ou d’infections bien définies, difficiles à traiter. En 2016, la proportion des antibiotiques de deuxième intention représentait encore 52 %, contre 16 % aux Pays-Bas. Pour les premiers mois de 2023, elle s’élève à 47 %. A titre d’exemple, l’amoxicilline (antibiotique de première intention) est aussi souvent prescrite que l’amoxicilline - acide clavulanique (antibiotique de deuxième intention). En fait, cette proportion devrait être de 80 % - 20 %.
Principaux prescripteurs et utilisateurs
69 % du volume total d’antibiotiques (délivrés en dehors de l’hôpital) est prescrit par des médecins généralistes, suivi par les dentistes avec un peu plus de 8 % du volume total. Nous constatons une forte variation entre les différents groupes professionnels : c’est ainsi que les médecins généralistes, les stomatologues et pédiatres prescrivent des antibiotiques à plus de 10 % de leurs patients en moyenne. Il n’est pas étonnant de voir une variation entre les médecins spécialistes, mais les variations au sein des spécialisations médicales sont tout de même très frappantes. Par exemple, un quart des médecins généralistes prescrivent annuellement des antibiotiques à un maximum de 9 % de leurs patients, tandis qu’un autre quart à au moins 22 % de leurs patients. Bien que ce résultat puisse certainement être dû aux différences dans la population de patients, cela suggère qu'il serait judicieux de permettre aux médecins de comparer leur comportement de prescription avec les lignes directrices scientifiques générales et le comportement de prescription de leurs collègues.
Lorsqu’on examine les principaux utilisateurs, on constate de manière peu surprenante que les malades chroniques et les personnes résidant dans un centre de soins résidentiels ingèrent plus souvent des antibiotiques. Mais les enfants de moins de 5 ans font aussi partie des plus grands utilisateurs.
Ruud Saerens, médecin-expert aux Mutualités Libres, explique : "De manière générale, les jeunes enfants figurent également parmi les plus gros consommateurs d’antibiotiques. Il s'agit très souvent d'infections des voies respiratoires, telles que les inflammations de l’oreille interne. Dans certains cas, un traitement adéquat par antibiotiques est très important. Dans d'autres cas, le médecin préférera d'abord contrôler les symptômes, à moins qu'il n'y ait des indications cliniques spécifiques pour commencer les antibiotiques tout de suite. En tant que parent, il est très important de respecter les prescriptions de votre médecin. Ne commencez jamais un traitement sans son accord, et respectez toujours la durée et la dose prescrite."
Pour arriver à une diminution de l’utilisation d’antibiotiques, il existe effectivement des directives à suivre aussi bien par les patients, les prescripteurs que les autorités. Ann Ceuppens, directrice du département Etudes et Représentation, déclare : "Outre le respect des directives par les prescripteurs, des mesures préventives peuvent également contribuer à réduire l'utilisation des antibiotiques. Une bonne hygiène des mains, se couvrir le nez et la bouche avec un mouchoir en papier ou avec l'intérieur du coude en toussant ou en éternuant aident à prévenir les contaminations. Lorsque c’est possible, la vaccination contribue également à la prévention. En outre, il est important de mener une politique globale car les bactéries résistantes sont en effet aussi présentes chez les animaux, dans les aliments et l'environnement. Enfin, il est possible de soutenir davantage les prescripteurs d’antibiotiques et d’améliorer le monitoring des comportements de prescription et de consommation, bien que des mesures aient déjà été prises dans la bonne direction".