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Rendre le métier d’infirmier(ère) plus attractif

La Belgique se classe au 5e rang de l’Union européenne avec 11,1 infirmiers pour 1.000 habitants.1 Notre pays compte 206.444 infirmiers autorisés à exercer la profession. Toutefois, seuls 60 % d’entre eux sont actifs dans les soins infirmiers aux patients.2 Cette prise de conscience devrait encourager la société à sortir la profession infirmière de l’ombre.

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Het aantrekkelijke verpleegkundig beroep voor de toekomst

Xavier Brenez  
Directeur général des Mutualités Libres 

Pendant la pandémie de coronavirus, les infirmiers ont enduré un épuisement physique et mental, tant pour les soins à domicile qu’à l’hôpital. La crise a douloureusement mis en évidence la pénurie de personnel au chevet des malades. Le vieillissement de la population et la demande croissante de soins qui en découle augmentent la pression au travail et le burn-out. Ils rendent la profession infirmière peu attrayante. Pourtant, la Belgique se classe au 5e rang de l’Union européenne avec 11,1 infirmiers pour 1.000 habitants. 

 

Xavier Brenez

Notre pays compte 206.444 infirmiers autorisés à exercer la profession

Toutefois, seuls 60 % d’entre eux sont actifs dans les soins infirmiers aux patients.2 Cette prise de conscience devrait encourager la société à sortir la profession infirmière de l’ombre. Il est nécessaire d’accorder à l’art infirmier la reconnaissance qu’il mérite pour rendre la profession à nouveau attrayante. S’engager pour nos infirmiers3 est une priorité pour garantir des soins de qualité pour les patients dans les prochaines décennies. 

1. Consolidation de la relation entre l’infirmier et le patient 

Une forme importante de reconnaissance de l’infirmier est de lui accorder suffisamment de temps pour aider réellement le patient. Se limiter aux tournées de médicaments, aux toilettes, à la prise de température ou de tension sont réducteurs par rapport à la plus-value qu’il peut apporter. L’infirmier joue ainsi un rôle central en ce qui concerne l’information et les choix de santé, la résolution de situations infirmières complexes, la mise en place d’un plan de soins, etc. A domicile aussi, il peut aussi découvrir des situations sociales qui nécessitent de l’attention, qu’il s’agisse par exemple de précarité ou de négligence du patient.

Notre système de santé ne prévoit donc pas suffisamment de temps et de ressources pour accomplir ces tâches avec qualité. Pourtant, dans ces moments-là, l’infirmier fait la différence pour le patient. Rétablir cette relation humaine entre l’infirmier et le patient apporte la satisfaction qui contribue à l’attractivité de la profession et au respect du patient. 

 

 2. Réorientation des ressources

Le financement public de la profession infirmière s’est transformé en un amalgame de bric-à-brac qui complique un déploiement optimal. Malgré l’augmentation de la masse budgétaire, le secteur continue de rappeler que cette dernière est insuffisante. Une réforme en profondeur du financement du secteur des soins infirmiers doit reposer sur une évaluation plus ciblée. Tant les ressources allouées aux soins infirmiers dans le budget des moyens financiers des hôpitaux que la nomenclature pour les soins infirmiers (à domicile) doivent être passés au crible. Une telle réforme permet la mise en place d’un système de financement uniforme, indépendamment du secteur d’emploi et de l’autorité compétente. Chaque infirmier mérite une même reconnaissance à travail égal !

 

3. Renforts pour les infirmiers

En vue de retenir les infirmiers dans la profession4, il est important de les entourer en tant qu’acteurs clés avec des profils de fonction diversifiés. Le personnel non médical peut soulager la surcharge de tâches administratives et logistiques à laquelle les infirmiers sont confrontés aujourd'hui : je pense par exemple à la planification des rendez-vous, à l’enregistrement et à l’analyse « qualité » des données de santé ou encore au transfert du patient d’un service à l’autre de l’hôpital… Toujours afin de dégager du temps, des monitorings pourraient être réalisés à distance. C’est le cas notamment en cardiologie où les résultats des pacemakers pourraient être relevés facilement moyennant une formation des professionnels et une information du patient. Enfin, la délégation effective des tâches à d’autres professionnels de la santé est clairement indiquée. 

Deuxièmement, le nombre d'infirmiers devrait être suffisant par rapport au nombre de patients.5 En Belgique, ce ratio tourne autour de 9,4 patients par infirmier, avec de grandes disparités entre départements et secteurs. Si un infirmier a la responsabilité d’un nombre gérable de patients, il en résulte une amélioration significative de la sécurité et de la qualité des soins. Etant donné que l’un des objectifs est de permettre à l’infirmier d'accorder plus de temps à chaque patient, il est important de viser le ratio de 8 patients par infirmier prôné au niveau international. Pour s’en assurer, l’Etat du Minnesota aux Etats-Unis est sur le point d’adopter une loi qui prévoit l’obligation pour les hôpitaux de mettre en place, en leur sein, une commission chargée de monitorer le nombre de patients par infirmière. 

Troisièmement, les organisations devraient élaborer une politique à laquelle les infirmiers pourront s’identifier pleinement. L’infirmier doit participer à la gestion de l’organisation. L’organisation doit accorder de la confiance et créer des opportunités pour le personnel actif sur le terrain. L’infirmier doit avoir l’opportunité de suivre des formations relatives aux dernières technologies infirmières et de réaliser des objectifs personnels. La possibilité pour les infirmiers de s’organiser en partie de manière autonome est un élément crucial à cet égard. L’hospitalisation à domicile le montre clairement. Les infirmiers à domicile et du secteur hospitalier devront collaborer de manière flexible. 

La société doit relever les nouveaux défis des soins infirmiers, une profession en transition, afin de garantir des soins de qualité aux patients de demain. Qu’ils travaillent au sein d’un service ou de manière indépendante, les infirmiers doivent retrouver le temps nécessaire pour prendre librement des initiatives dans le cadre de leur profession. Débloquer des ressources financières en guise de reconnaissance uniquement ne suffit pas à obtenir l’attractivité et la satisfaction. Continuer à investir dans l’encadrement de nos infirmiers et dans le temps qu’ils peuvent consacrer au patient est tout aussi important !

Expert- soins infirmiers: Benoit Mores  (benoit.mores@mloz.be)